mercredi 21 janvier 2015

Les racines du mal


Beauté et horreur du monde
Les racines du mal
A la veille de la première guerre mondiale, il y a tout juste un siècle, dans un village de l’Allemagne du Nord protestante, se produisent des faits étranges et inexpliqués.Des enfants et adolescents d’une chorale dirigée par l’instituteur du village, leurs familles : le baron, le régisseur, le pasteur, le médecin, la sage femme, les paysans. D’étranges accidents surviennent et prennent peu à peu le caractère d’un rituel punitif.
Le film est accompagné d'une voix-off, interprétée par l'instituteur, personnage clé du film, qui confère à celui-ci, plusieurs années après, sa dimension de chronique.
L'éducation, où la religion protestante rigide et puritaine occupe une place centrale, inscrit l'œuvre dans une dimension historique.
Un film inclassable, entre Dreyer, Bergman, Ford et Siegel, qui mélange les artefacts du film fantastique (celui des séries B des années 60), l'austérité et la beauté du cinéma nordique d'après-guerre, et certains codes du western.
Il est question de rapports entre parents et enfants, entre adultes, et enfants entre eux. Le poids de l'éducation stricte et austère face à l'innocence de la nature enfantine.
Une œuvre d’une mise en scène implacable, redoutable et d’une haute précision, qui nous montre beaucoup mais qui cache énormément (rôle des hors champs*) ce qui induit chez le spectateur plus de questions que de réponses, sur l'intrigue en particulier.
Ce que nous montre en réalité Haneke, et c'est de coutume dans son œuvre, c'est bien le fonctionnement brut et clinique de la mécanique humaine (sociale, familiale, sexuelle,...) dans ce qu'elle a de plus triviale. C'est en ce sens qu'il montre mais ne démontre rien. Il n'est pas là pour juger mais pour nous faire témoigner, ouvrir une fenêtre, une brèche dans le temps. Posé ce constat, il n'en demeure pas moins que ce que nous voyons à l'écran est bel et bien un choix esthétique et surtout éthique du cinéaste... C'est au spectateur de se poser (ou de s’interposer) et de s'interroger en tant que témoin actif du film. Le thème de prédilection de Haneke, la violence (souvenons-nous du stupéfiant Funny Games, version 97), ici plus latente et toute vouée à alimenter le climat du film dans ce qu'elle possède de plus angoissant. Cette violence, nous la vivons, sans qu'elle ne soit dans la réalité filmée. Une des prouesses du film.
Le clivage (subtilement montré) entre deux mondes singulièrement et radicalement opposés, une Nature dont les bruits (vent dans les feuillages, bruit de l'eau) évoquent la douceur ou la chaleur, la musique de la mère Nature (chant des oiseaux), et la beauté plastique (cadrages, plans en noir et blanc exceptionnels) contraste avec la Nature Humaine (vile, calculatrice, violente, froide, cachée), et sa volonté de maîtrise et de domination, notamment du masculin sur le féminin et de l'adulte sur l'enfant. Je repense à cette scène – sublime - lorsque l'enfant offre à son père (pasteur) un oiseau, soigné et maintenant rétabli, en remplacement du sien, et à l'impossibilité pour le père d'exprimer la moindre joie ou de l'affection pure, prisonnier de sa fonction et transformé par le "mal" qu'un enfant ne possède pas (encore!).
A l’image de la musique de Bach, le cinéma de Haneke possède une écriture contrapuntique caractérisée par la superposition de thèmes (voix narrateur/dialogues ou dialogues/bruits Nature), de procédés narratifs contraires (violences des rapports humains/sérénité Nature).
Quand nous songeons que ces enfants dépeints par le cinéaste dans Le Ruban Blanc auront atteint l'âge de la "maturité" dans les années trente, ça fait froid dans le dos....Tentative d'expliquer un des fondements de la barbarie que connaîtra l'humanité 25 ans plus tard, ou mise en abîme d’une perspective historique? On ne peut s'empêcher d'y penser....
Un grand film qui fera date; Michael Haneke nous prouve une fois de plus qu'il reste l'un des plus grands cinéastes de son temps.

A la veille de la première guerre mondiale, il y a tout juste un siècle, dans un village allemand se produisent des faits étranges et inexpliqués.
Le film est accompagné d'une voix-off, interprétée par l'instituteur, personnage clé du film, plusieurs années après.
L'éducation où la religion protestante, rigide et puritaine, occupe une place centrale, inscrit l'œuvre dans une dimension historique.

Un film inclassable, entre Dreyer, Bergman, Ford et Siegel, qui mélange les artefacts du film fantastique (celui des séries B des années 60), l'austérité et la beauté du cinéma nordique d'après guerre et une référence aux codes du western.
Il est question des rapports entre les parents et les enfants, des adultes et des enfants entre eux. Le poids de l'éducation stricte et austère face à l'innocence de la nature enfantine.

Une œuvre qui nous montre beaucoup mais qui cache énormément (rôle des hors champs) ce qui induit chez le spectateur plus de questions que de réponses, sur l'intrigue en particulier.
Ce que nous montre en réalité Haneke, et c'est de coutume dans son œuvre, c'est bien le fonctionnement brut et clinique de la mécanique humaine (sociale, familiale, sexuelle,...) dans ce qu'elle a de plus triviale. C'est en ce sens qu'il montre mais ne démontre rien. Il n'est pas là pour juger mais pour nous faire témoigner et ouvrir une fenêtre, une brèche dans le temps. Posé ce constat il n'en demeure pas moins que ce que nous voyons à l'écran est bel et bien un choix esthétique et surtout éthique du cinéaste... C'est au spectateur de se poser et de s'interroger en tant que témoin actif du film. Le thème de prédilection de Haneke, la violence (souvenons-nous du stupéfiant Funny Games, version 97), ici plus latente et toute vouée à alimenter le climat du film dans ce qu'elle possède de plus angoissant. Cette violence, nous la vivons, sans qu'elle soit dans la réalité filmée. Une des prouesses du film.

Le clivage (subtilement montré) entre deux mondes singulièrement et radicalement opposés, une Nature dont les bruits (vent dans les feuillages, bruit de l'eau) évoquent la douceur ou la chaleur, la musique de la mère Nature (chant des oiseaux) et la beauté plastique (cadrages, plans et noir et blanc exceptionnels) contraste avec la Nature Humaine (vile, calculatrice, violente, froide, cachée), et sa volonté de maîtrise et de domination, notamment du masculin sur le féminin et de l'adulte sur l'enfant. Je repense à cette scène-sublime-lorsque l'enfant offre à son père (pasteur) l'oiseau, maintenant rétablit, pour remplacer le sien, et à l'impossibilité pour le père d'exprimer la moindre joie ou de l'affection pure, prisonnier de sa fonction et transformé par le "mal" qu'un enfant ne possède pas (encore!).

Quand nous songeons que les enfants que nous montrent le cinéaste dans Le Ruban Blanc auront l'âge de la "maturité" dans les années trente ça fait froid dans le dos....Tentative d'expliquer un des fondements de la barbarie que connaîtra l'humanité 25 ans plus tard? On ne peut s'empêcher d'y penser....
Un chef d'œuvre qui fera date, M. Haneke nous prouve une fois de plus qu'il reste l'un des plus grands cinéastes de son temps.

Filmographie:

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